Peu à peu les choses s’imposent. Plus le temps passe, moins elles sont exotiques. Les systèmes pré-pensés s’effondrent. Les dénonciations sont plus vaines que jamais. Les fanfaronnades plus illusoires. Il va nous falloir penser à partir de ce réel qui nous heurte de plein fouet : c’est une chose qui nous arrive et qui nous échappe tout à la fois.
Être dans le monde et pas du monde, c’est la place que nous invite à occuper l’évangile selon Jean (chapitre 17). Rien à voir avec une fuite dans un au-delà du monde, dans une autre vie. Car c’est bien d’habiter le monde, ici, maintenant, tel qu’il est dont il est question. Comment être présent au monde sans s’y abîmer, sans se laisser prendre par le « divin marché » (à la fois le marché divinisé, mais aussi la commercialisation religieuse du divin) ? Sans se couler dans la logique où tout n’a de valeur que marchande. Sans non plus revêtir le réel d’un pieu manteau qui ne fait plus vivre grand monde.
Autrement dit, quel est ton humus ?
Plonges-tu tes racines dans une volonté d’expliquer la nature du mal, et tu en resteras prisonnier. Parce que tu lui chercheras -et lui trouveras au moins provisoirement- un sens. Donc une justification.
Plonges-tu tes racines dans le nom de celui qui en dénonce l’absurdité (Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ?), et tu y trouveras une raison de t’engager dans le combat, sans devenir pour autant un guerrier.
Didier Fievet