Le désert m’a toujours fasciné. Associé à un curieux rêve : un jour, au loin, surgirait une tente. Silence soyeux qui s’écoule du col élancé d’une théière de métal, pénombre bienveillante, regard immobile. Brûlant. Le désert comme écrin d’une improbable rencontre.
Plus que jamais, on fait taire le désert. On le remplit de bruits. Pour conjurer la solitude.
Pourtant, l’humain a-t-il jamais eu d’autre tâche que de tenter d’habiter une solitude première ?Nos villes ont elles jamais eu d’autre dessein que de nous l’épargner, cette solitude trop périlleuse ?
En hébreu, désert se dit midbar. Littéralement : depuis le coeur des choses, depuis le coeur de la parole. Le désert est le lieu du réel (cf. en latin res, la chose). Le désert est le lieu de la parole. Le désert est le lieu d’un combat intime entre un réel muet et une parole première.
Pour Jésus la case désert sera la case départ.
Si la parole fondatrice est un ordre, un impératif, un « il faut » : c’est un destin. À subir.
Mais si elle est appel, éveil, promesse : elle ouvre sur une vie à recevoir et à construire du même mouvement. Une histoire à mettre en paroles.
Le désert est toujours le lieu de l’épreuve. Certains traduisent par tentation, pourquoi pas si on enlève à ce mot toute connotation morale. Car la tentation dont il s’agit, c’est ni plus ni moins que le combat de la liberté. Celle qui nous est donnée : un Évangile qui ne se veut que promesse…
Didier Fievet